dimanche 7 mars 2010

In memoriam

Plus je vieillis, plus les personnes mentionnées dans le segment «In memoriam», aux Oscars, ne me sont pas complètement inconnues. Il n'y a pas si longtemps, il me semble, ce moment me laissait regarder défiler de vieilles photos en noir et blanc d'acteurs de films muets, de réalisateurs fossilisés et de producteurs juifs ayant personnellement connu Jésus. Ce soir, je me rends compte que le temps passe. Très vite.

Des artistes que j'ai connus sont morts. Même Michael Jackson est mort! D'ailleurs, il a eu droit, comme tous les autres, à ses quatre secondes d'extraits et à un montage photographique de sa vie composé de trois images. Est-ce que c'est ce qui nous attend tous, un hommage de quatre secondes et un récit de nos vies tellement schématique qu'il fait paraître un résumé de film sur le guide Illico presque aussi long qu'un roman comme Guerre et Paix? J'ai pensé à ça et j'ai trouvé ça déprimant. Ensuite, j'ai réfléchi davantage et j'ai réalisé que les chances que j'aie mes quatre secondes de gloire post mortem aux Oscars étaient littéralement nulles! Je n'allais même pas mériter quatre secondes!

Après ça, je me suis dit: «So fucking what?». Non, mais, c'est vrai. So fucking what? Je vais être mort. Qu'est-ce que ça va bien me câlisser qu'on me fasse un hommage, court ou long, aux Oscars ou aux Métrostar, avec un numéro musical touchant - mais de bon goût, ou non?

Après ça, j'ai pensé: «Tu parles d'une préoccupation, en fait. C'est pas un peu morbide penser à ça?».

Après ça, j'ai essayé de ne plus penser à ce qui arriverait après ma mort, mais bien à ce que je vivais en ce moment.

Après ça, j'ai réalisé que «ce que je vivais en ce moment», c'était justement ça: penser au fait que mes chances d'avoir un hommage éclair de quatre secondes aux Oscars étaient plus qu'improbables.

Après ça, je me suis convaincu que de penser à ça était normal, mais qu'il ne fallait pas trop s'en faire avec ça; que le plus important était ce qu'on était dans le moment présent, pas le diaporama pour spectateurs en déficit d'attention qu'on allait présenter une fois qu'on lèverait les pattes.

Après ça, j'ai eu à nouveau ce malaise à propos de combien morbide c'était de penser à tout ça.

Après ça, j'ai essayé de me concentrer sur mon moment présent. Mais tout ce que je voyais, c'était moi en train de penser à des choses morbides comme la mort et les Métrostar.

Après ça, j'ai tenté d'arrêter de penser. J'ai pas été capable. Je revoyais la vie de Michael Jackson racontée en trois images comme si ça se pouvait, raconter la vie de quelqu'un en trois images. J'ai imaginé les dilemmes qu'avaient vécu ceux qui avaient dû sélectionner les trois photos en question: «So, the one where he's about to drop his baby down the balcony is out?» et je me suis dit qu'ils avaient quand même eu un minimum de classe.

Après ça, j'ai espéré qu'on ferait preuve de cette même classe quand mon tour viendrait.

Après ça: retour à l'inconfort morbide.

Après ça: «here and now, Robert, here and now!»

Après ça: «Robert, t'es pogné dans une pensé en spirale. Lâche prise, ça finira jamais!»

Après ça: «Pense à d'autre chose, Robert. Quelque chose de vraiment pas rapport...», mais je n'ai rien trouvé. J'étais vraiment pogné dans ma spirale.

Après ça, j'ai pensé à un truc qui ne rate jamais. J'ai tapé «Dead Tupperware» sur Google images. J'ai cliqué sur la première photo qui est sortie. Je l'ai sauvegardée pour l'afficher sur mon message d'aujourd'hui. Pas mal, non? Ça s'intitule: Death by Tupperware.

Heureusement, tout ça, c'est du passé.

P.S.: Plus de détails sur cette artiste visuelle vraiment craquante ici.

3 commentaires:

  1. Ouf, la pensée en spirale provoque le rire en cascade ! Merci Robert !

    As-tu eu ton moment de nostalgie devant l'hommage à John Hugues avec des extraits de Breakfast Club, Sixteen Candles, etc. ?

    RépondreSupprimer
  2. J'ai manqué cet hommage! Ceci dit, la nostalgie, quelle bonne façon de me retrouver à nouveau dans une pensée en spirale...

    RépondreSupprimer
  3. Après tout ça, les Oscars devaient être finis!!!

    (Moi aussi, Miro, j'ai aimé l'hommage à Hughes en plus de trois images...)

    RépondreSupprimer