mardi 21 septembre 2010

À un cheveu de la folie

25 minutes.

Oui, je dois maintenant me lever 25 minutes plus tôt le matin afin d'atteindre le look «coiffé-décoiffé». Ne riez pas. Ce look «décontracté», que les anglos appellent bed-head (la tête de celui ou de celle qui sort du lit) requiert une série d'étapes de lavage, de rinçage, de peignage, de séchage, de coiffage et de tant d'autres étapes de gossage de finition que, des fois, ça me décourage. Tout ça pour quoi? Pour donner l'impression qu'on n'a rien fait, qu'on est tellement «laisser-faire», qu'on se fiche de tout.

C'est fou comme le désordre a la cote. Malheureusement, j'ajouterai. C'est vrai, elle était belle l'époque où avoir de l'ordre ne faisait pas partie des désordres mentaux. Maintenant, si on a le malheur de repasser ses chemises ou de trier ses billets de banque en les plaçant par ordre de valeur et tous du même sens dans notre portefeuille, on passe pour un détraqué dangereux. Ça fait peur, l'ordre. Ça dérange. C'est louche.

À l'inverse, le fouillis est parfaitement accepté socialement. Il est même recherché. Cet homme travaille dans un bureau où les papiers s'empilent sur des surfaces qui n'ont pas vu la lumière du jour depuis 1984? On louange son ardeur, on soupçonne son génie. Cette enfant barbouille sa feuille avec de la gouache de toutes les couleurs, dans un tourbillon incontrôlé? On sourit de fierté: elle deviendra sans doute une grande artiste. Ce spectacle de théâtre met en scène non pas de vrais acteurs, mais bien des employés d'une usine de dalles de béton en Pologne qui se jettent sur les murs en criant? On salive devant «cette grande oeuvre qui, grâce au pouvoir de ces non-acteurs, touche (enfin) avec vérité l'âme écorchée d'un peuple». En plus, le décor est laid, alors, ça doit vraiment être bon.

Bref, me voici, avec mon bed-head, l'air 25 minutes plus fatigué, tentant d'être dans l'air du temps.

Et c'est fou ce que j'ai l'air décontracté.

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