jeudi 16 septembre 2010

Un désordre, la nuit

La nuit dernière, je dormais et je cherchais à rehausser la qualité générale de mes rêves. J'essayais de créer des liens, de mieux contrôler les intrigues, d'épurer le fruit de mon «entertaintment system» nocturne. À ma grande déception, je n'y suis pas arrivé.

C'était décousu! Incroyable. je faisais des efforts, pourtant. Je tâchais de conclure chaque petite histoire, au moins, avant d'en commencer un nouvelle. C'est la base, il me semble? Mais même ce simple défi se voyait soldé par un échec. Les personnages n'avaient aucune constance. Ils se multipliaient, se dédoublaient, disparaissaient sans raisons valables, ils se transformaient, passant d'une identité floue à une autre. Les décors étaient sans intérêt, laissant toute la place à des détails insignifiants, sans démontrer de ligne directrice. Aucun dispositif central ne permettait de créer une unité entre les scénarios tordus qui défilaient. Les palettes de couleurs semblaient sortir du pire des magazines de rénovation bon marché. La tension dramatique, vraiment, était comparable à la lecture des cotes de la bourse, variations en moins. J'ai noté plusieurs invraisemblances: des accessoires qui se volatilisent selon l'angle de vue, des sons provenant des mauvais endroits, des ellipses incompréhensibles. C'était lamentable.

Tout ça venait-il réellement de mon cerveau? J'ai eu honte, en me réveillant. C'était indigne. Indigne de moi. Tous ces rêves sont mes créations nocturnes, que je me suis dit. Et je me suis trouvé mauvais. Sans aucun sens du drame. Confus, même. Pas même capable de raconter une histoire simple sans divaguer, tergiverser, hésiter ou me perdre dans des méandres inconstants, interminables, ennuyants.

Pire: je pense que je n'ai aucun talent d'acteur dans mes rêves. Je joue faux. J'en mets trop, ma voix craque. Mes expressions faciales sont inappropriées. On ne me suit pas dans mon parcours intérieur, tant je veux exprimer tout et son contraire, sans aucun sens du découpage ou de la précision. Physiquement, je n'ai aucun tonus. Je pense faire des efforts, pourtant, mais c'est comme si mon corps était engourdi. Je suis le pire cauchemar d'un professeur de mime corporel.

J'hésite à faire ce dernier aveu, mais, que voulez-vous, c'est comme ça: je rêve cabotin. Des pseudo histoires mettant en scène des pénis, de la nudité gratuite, de l'urination publique, des blagues faciles, en voulez-vous, en v'là. C'est à croire que mes rêves s'adressent à un public d'adolescents mâles de 14 ans. Pourquoi mon subconscient désire-t-il tant me divertir avec ce genre de désolantes sottises? Sais-t-il seulement à qui il s'adresse? Et moi, là dedans, je reste là, couché, sans réagir, impassible devant tant de nullité?!

Il y aurait un grand ménage à faire là-dedans, c'est sûr. Mais non: Môssieur Robert, il dort. Môssieur Robert, il dit ne pas avoir le contrôle là-dessus. Môssieur Robert, il rêve du n'importe quoi, n'importe comment.

J'aimerais tellement rêver les rêves que je mérite. Je ne sais pas, moi, des rêves plus ordonnés.

Les rêves de mes rêves, quoi.

6 commentaires:

  1. joli désordre jolie photo

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  2. Je suis soulagé, cher Robert, qu'il reste encore en vous un espace de désordre, de chaos, où les épices ne sont pas dans des pots avec un couvercle assorti, où les chemises ne sont pas classées par couleur, où toutes les étiquettes ne regardent pas du même côté. Ça vous rend un peu plus humain et vous rapproche de moi, qui suis par moment tellement votre contraire...

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  3. C'est réellement étrange que ce désordre me rende plus humain, mais, eh... merci.

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  4. Je ne voudrais pas vous blesser, mais chez moi les rêves sont très inventifs et "punchés".... toute la maisonnée est dans un ordre incroyable, et je suis brillante dans tout...
    Je crois que votre cerveau, comme le mien, est une "bibitte" qui n'en fait qu'à sa tête et que pour notre santé globale, cette "bibitte" cherche à créer un équilibre....
    Visiblement, nous vivons vous et moi des réalités disons.... complémentaires!

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  5. J'apprécie vivement cette théorie, mais, malgré tout, j'aimerais tellement rêver vos rêves, parfois... On échange?

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