vendredi 13 août 2010

Tourner autour du pot

C'est quoi mon sujet, au juste? Ah, oui, c'est un sujet épineux. Mais je pense qu'il fallait bien que j'en parle un jour ou l'autre. Comment dire? Traiter de ce sujet requiert un doigté extraordinaire. On ne peut pas attaquer ce sujet comme une panthère attaque une gazelle, non. La gazelle n'a pas le temps de se rendre compte de quoi que ce soit et hop une série de crocs est plantée dans son flanc. S'il y a la moindre trace d'hésitation de la part de la panthère, c'est fini: la gazelle risque de se sauver loin, loin, loin. Mais la crainte de la gazelle demeure. Elle ne passe pas une belle journée. Elle se demande quand la panthère va revenir. Elle est tellement préoccupée par cette pensée qu'elle ne voit pas venir le lion tapi dans l'ombre. C'est une scène qu'on a vu tellement de fois. Moi, dans mon enfance, je regardais la Mutuelle d'Omaha avec mon père. Cette série télévisée n'hésitait pas à mettre le paquet pour nous montrer la nature et ses dangers. Oui, des animaux mourraient, mais c'est ça, la vie d'animal. Manger et être mangé. Capturé par une tribu africaine qui en a assez de bouffer des vers blancs trouvés sous l'écorce des arbres. Moi, jamais je ne pourrais manger ça, des vers blancs. Pas à moins d'avoir vraiment, mais vraiment faim. Dans le cas d'une catastrophe mondiale où je serais un des seuls survivants, entouré de très peu de nourriture (parce qu'on aurait pas pris le temps de conserver ce qu'il faut dans des Tupperware ou que ces Tupperware-là seraient engloutis sous une couche de boue, avec toutes les traces de notre civilisation), dont quelques insectes qui auraient peut-être, eux, ressenti la catastrophe venir et qui auraient pris le temps de se cacher à la bonne place. Des fois, je pense à ça, une espèce de fin du monde et je me vois parmi les survivants et je me vois surtout me sentir pas mal inutile dans un groupe de survivants. Je préparerais probablement la nourriture, j'imagine. Mais sans mes ustensiles de cuisine modernes, je ne suis pas certain que je serais très efficace. Non, mais, un couteau économe, c'est vraiment pratique. Je regardais un reportage sur la vie au Mali et des femmes passaient leurs journées à moudre du grain avec un gros bâton. Elles frappaient, elles frappaient... Moi, après cinq minutes, je me tannerais, je pense. Je me dirais: «On pourrait pas manger le grain entier? Ou manger du poulet ou des petits fruits cueillis simplement?» et je jetterais le bâton au bout de mes bras en levant les yeux au ciel comme pour dire «Fuck, estie». Là, les autres survivants se regrouperaient autour de moi en me criant des noms dans leurs langues d'origine (dans cette fin du monde-là, on ne serait pas tous de la même ville, en tous cas, ça me semble logique, mis à part le fait que ça voudrait dire qu'on aurait marché vraiment longtemps pour se retrouver) et me banniraient du clan. Je serais condamné à errer, seul, et à me nourrir de racines (mais des racines de quoi?) et à boire de l'eau boueuse même pas de verre. Un verre, me semble que c'est le minimum qu'on devrait sauvegarder en cas de fin du monde. Ou une bouteille. Le mieux, ce serait un contenant ni trop haut, ni trop bas. Un pot, tiens. Rond, probablement, qui pourrait nous servir à toutes sortes d'affaires comme manger, boire, cueillir des fruits, ramasser des pierres pointues, conserver des petits objets fragiles comme des lentilles contact (même si je doute qu'il en reste dans cette éventualité - de toutes façons: pour voir quoi?) ou simplement pour avoir avec soi un contenant, juste au cas. On ne sait jamais à quoi ça pourra servir, mais on se doute bien que ça va être utile. Oui, vraiment, ça prend ça, juste au cas: un pot. Vous voyez ce que je veux dire?

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