mercredi 16 juin 2010

L'âge de plastique

L'exposition Bodies, vous connaissez sûrement. On peut y voir des corps humains réels, dépecés, dans toutes sortes de positions loufoques (comme jouant au foot - Go la Suisse, go!), dans un but précis: nous faire faire des grimaces de dédain. Le but officiel est de nous faire découvrir l'intérieur du corps humain, cette «merveilleuse machine», mais, soyons sérieux: ce n'est pas l'intérieur qui compte. Bien sûr, les corps ne sont pas réellement exposés dans leurs matières originales, mais bien en résine, selon une technique appelée «plastination». Bref, les corps sont vrais, mais en plastique. Plusieurs débattent que cette exposition fait un usage immoral de dépouilles humaines. La rumeur veut que certains de ces corps aient été «empruntés» à des prisonniers chinois.

Mais ce n'est pas de cela que je veux vous parler.

Je ne sais pas si un jour, dans un futur éloigné, quelqu'un aura l'idée de créer une sculpture avec mon cadavre? Est-ce que ce serait une bonne façon de devenir éternel? J'y pense, des fois. Il n'y a rien d'immoral là-dedans! C'est quoi, un corps humain sans vie? Juste un amas de matières diverses (surtout du carbone, dit-on)...

Nos corps ne sont même pas faits de matières qui traversent bien le temps. Merveilleuse machine, mon cul! Nos cellules se dégradent. Nous nous décomposerons. Tous autant que nous sommes.

Alors, être transformé en sculpture en plastique, c'est super, non?

Le plastique autour de nous nous survivra. Regardez autour de vous. Dans des conditions normales, on peut facilement dire que 75% de ce qui nous entoure nous survivra (bon, c'est pas scientifique, mais sûrement pas si faux que ça). Certaines matières se désintégreront bien avec nous, comme le bois ou le papier, mais d'autres matières, les matières modernes surtout, jouiront de centaines, voire de milliers d'années de survie de plus que nous. S'il reste des humains sur la Terre dans des milliers d'années, ils auront donc plus de chance de tomber sur un fragment de Tupperware qu'un fragment de Robert.

Ça me rassure, moi, de penser à ça. Toute notre histoire, toutes nos gaffes, un jour, seront oubliées. Au pire, il ne restera qu'un pot à jus vert avocat à blâmer.

J'y pense.

En se faisant plastiner, on s'engage à rester bien plus longtemps parmi les débris des fouilles archéologiques du futur. Je me ravise donc. Être transformé en sculpture en plastique n'est pas si super que ça. On dira: «Regardez, c'est la faute à des humains comme celui-ci si nous avons traversé tant de périodes difficiles». Être un des rares coupables, non merci!

Mieux vaut donc rester discret et se décomposer comme tout le monde. Bon. Pas tout de suite, mais, un jour. Plus tard. Devenir poussière.

Au pire, alors, on donnera un peu de souci à un Robert du futur qui passera l'aspirateur.

Un aspirateur en plastique, bien entendu.

3 commentaires:

  1. Commentaire hors-contexte, mais je me demandais quelle était ton opinion sur cette citation:

    "L'homme le plus heureux du monde est celui qui peur relier la fin de sa vie avec son commencement."

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  2. Intéressant... Ça demande réflexion. Mon opinion suivra bientôt. Promis,

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  3. OK, voici mon opinion: on nait dans le minimalisme le plus total. On n'a rien. Pas d'ambitions, pas d'angoisses, pas d'attentes, pas de regrets. Rien ne nous appartient. Si, le jour de notre mort, on atteint à nouveau ce minimalisme, c'est le bonheur.

    Alors, je suis d'accord avec l'affirmation.

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