«La beauté des images est logée à l'arrière des choses, celle des idées à l'avant. De sorte que la première cesse de nous émerveiller quand on les a atteintes, mais qu'on ne comprend la seconde que quand on les a dépassées.»
Marcel Proust,
À la recherche du temps perdu
J'ai toujours secrètement envié les gens réellement profonds, du genre qui peuvent être vivement touchés par les oeuvres des plus grands de notre monde, qui n'ont pas peur de la littérature avec un grand «A» et qui sont capables de citer des extraits significatifs, le moment venu, qu'ils peuvent même parfois placer en exergue en tête de leurs propres ouvrages.
Ça m'impressionne, vraiment.
Moi, je n'ai pas cette capacité. Quand j'ai l'impression qu'une oeuvre est un peu hermétique (comme un Tupperware de qualité), je me ferme moi aussi. Bien sûr, souvent, ce n'est qu'une impression. Mais une fois fermé, je reste sur cette impression. Il y a des sujets, des styles, des auteurs qui m'intimident. Comme Proust. J'sais pas pourquoi. Vous me direz: «mais Robert, tu as tort, c'est avec Proust que naît le roman moderne!», mais je reste intimidé.
J'ai besoin de me sentir invité pour attaquer un roman. Un titre accrocheur. Une belle couverture. Des photos. Un peu d'humour. Un narrateur qui parle au «je» et qui vit dans un monde semblable au mien, avec des aspirateurs, des prises électriques et des lave-vaisselle.
C'est tout un aveu que je vous fait là. Ce n'est pas reluisant. Je dois vraiment être une personne limitée. Je dois être profondément... superficiel. Dommage.
L'extrait en exergue, aujourd'hui, me vient d'un site web qui permet d'accéder à des citations de Proust. C'est chouette, vraiment. Il y a des photos de Proust, la «citation de la semaine», et même un engin de recherche de citations par thèmes. C'est vraiment bien classé. Ça m'apporte beaucoup, des sites web de ce genre. Comme un soulagement frivole. Il faut accepter les bonheurs frivoles. Ça fait du bien.
Comme le disait si bien Marcel: «Mais puisque je savais maintenant que je ne pouvais rien atteindre de plus que des plaisirs frivoles, à quoi bon me les refuser?»
comme par exemple un gros noeud pap en soie
RépondreSupprimern'est-ce pas à Buenos Aires qu'il n'y avait pas de noeud pap ?
En effet...
RépondreSupprimerRobert, mais quel brio : discourir sur Proust, les Tupperwares et les aspirateurs dans un même souffle ! Je suis soufflée ! Quelle émouvante frivolité profonde ! Je crois qu'une nouvelle muse vient de naître.
RépondreSupprimerAvoir lu Proust, je le relirais, je pense.
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