Manger la peau du poulet, c'était nocif pour la santé. Dans son emballage épidermique, le poulet emmagasinait tous les mauvais gras, lui qui était pourtant réputé pour être constitué de viande maigre. Le poulet savait que sa peau, une fois mangée, augmenterait les risques d'obésité, les taux de cholestérol et le simple sentiment de culpabilité ressenti chez l'humain trop gourmand. Ce savoir, c'était la petite vengeance du poulet. On voulait l'élever dans des conditions horribles, l'abattre avant même qu'il n'ait pu connaître quelques plaisirs de la vie, le rôtir à la chaîne en ajoutant une quantité astronomique de sel, eh bien, il s'assurerait que sa peau soit croustillante et savoureuse, tuant à petit feu cette race qui avait décidé de le tuer, lui.
Robert aussi savait tout ça. Mais, si la chair est faible, la peau (le contenant de la chair), était si appétissante. Ce soir-là, il dévora donc la peau de son demi poulet en cuisses, qu'il avala, lambeau après lambeau. Robert ne se soucia même pas d'utiliser fourchette et couteau. Il mangea avec ses doigts coupables, qu'il lécha, même, tant ceux-ci étaient tachés non pas du sang du crime, mais bien de cette véritable graisse du crime. Robert offrit un spectacle dégoûtant et indigne de lui. Pire: il aima ça.
C'était clair, le désordre mondial était inévitable.
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